Ce que j'ai compris de l'histoire mongole

Bon, peut être que vous pensez que je passe mon temps à faire la tournée des bistrots à Oulan-Bator, mais vous vous méprenez. J’enquête. Comme j’ai préparé assez peu mon voyage, je n’ai pas une grande idée de l’histoire des pays que je traverse. En plus, j’ai très moyennement confiance dans l’analyse historique que pourrait me donner le Lonely-Planet, alors j’ai essayé de comprendre un peu l’histoire de la Mongolie en demandant aux mongoles que j’ai croisé de me la raconter. Voilà un peu ce que j’en ai retenu (j’avoue, c’est les thèmes qui m’intéressent).
J’ai remarqué avec ma guide et mon chauffeur lors de mon tour d’une dizaine de jours, que la période communiste de la Mongolie n’était pas foncièrement un souvenir noir pour les mongoles. Après la RDA et la Russie, c’est le 3eme pays anciennement communiste que je découvre, avec 3 approches du passé un peu différentes.
En RDA, tout est fait pour effacer la période communiste. Les faucilles sont vendus séparéments des marteaux, les statues de Lenine déboulonnées, et le grand travail de “bouh c’était des méchants les rouges” est bien avancé (merci de m’incendier sur mon racourcis assez violent, ça me prouvera que j’ai des lect-rice/eurs).
En Russie, j’étais assez surpris du fait que les symboles soviétiques étaient toujours omni-présents. Des statues de Lenine dans tous les coins de la ville, des faucilles et des marteaux sur tous les bâtiments, des drapeaux rouges sur des monuments, le mausolé de Lenine géré par l’armée… Dans la population, je n’ai pas resenti vraiment de critique de cette époque. Avec le passage à la démocratie capitaliste, il faut croire que les russes n’ont pas foncièrement gagné en liberté, ils/elles ont surtout perdu en avantages sociaux et ont découvert le chômage. À côté de ça, la période glorieuse pour la Russie s’est arrêté avec la chute du régime communiste, ça a forcément des effets de bord (là aussi, merci de m’incendier).
Venons en maintenant à la Mongolie. Ici, le communisme est arrivé par la révolution de 1921, et est resté jusqu’à la chute du bloc.
Ma guide m’expliquait timidement que pendant la période communiste, tout le monde avait un travail, que les études amenaient à un emploi assuré, et que les usines étaient très productives. Par exemple, elle m’expliquait que trouver des poulets était devenu beaucoup plus difficile depuis l’avènement du régime démocratique, car les usines de poulets avaient fermé. De même, dans une famille nomade vivant près d’une petite ville, qui nous a hebergé une nuit, le grand-père disait qu’il regrettait la période communiste, car ses enfants ne trouvaient pas de travail, et que les comportements des gens de la ville étaient devenus étranges depuis la chute du régime.
Comme ma guide restait assez timide sur ces thématiques, j’ai recommencé mon enquête auprès d’une amie mongole de mon age.
L’arrivée du communisme
Depuis le 17eme siècle, la Mongolie est sous contrôle politique Mandchoue, à priori plutôt bien accepté par la population. En même temps, les mandchoues utilisent une stratégie pour réduire la population mongole : les convertir au boudhisme. Les hommes devenant bonzes sont exonérés de l’impôt. Comme ceux-ci font veux de chasteté et de célibat, ils ne se reproduisent plus. À côté de ça, les chefs religieux mongoles (une sorte de roi) lorgnent pour récupérer leur pouvoir politique cédé aux mandchoues. La révolution chinoise contre l’empire mandchoue transfert le pouvoir mandchou aux chinois en Mongolie. Avec la révolution bolchévique, les Tsar(istes) trouvent refuge en Mongolie, en prométant au roi de l’aider à retrouver le pouvoir politique en chassant les chinois. Face à ce pouvoir tsariste, Sükhbaatar et quelques autres personnes fondent le parti révolutionnaire et vont demander l’aide de l’armée rouge pour chasser les tsars et les chinois.
Le parti révolutionnaire mongole est soutenus par les paysans nomades qui représentent la majorité de la population. Il faut bien avoir en tête qu’il n’y a à ce moment là pas encore d’industrie ni de villes en Mongolie. Les nomades étant soumis à l’impot chinois, une grande partie vit dans des conditions de pauvreté très forte. La révolution de 1921 amène à la création de la république populaire mongole.
Peu après Sükhbaatar qui avait initié la révolution, mais qui ne voulait pas suivre la ligne de moscou décède dans un accident lors d’un voyage en Russie (il nettoyait sa faucille, le coup de marteau est parti tout seul).
Le programme du parti révolutionnaire est assez simple : redistribuer les richesses et organiser la production à un niveau étatique. Le mode de vie des nomades est globalement respecté, mais les têtes de bétail sont redistribués par l’état à travers les nomades. Chaque famille nomade est chargée d’un cheptel de taille équivalente. Les familles sont également spécialisées dans un type de bétail (chevaux, yacks, chèvres, moutons, …) selon leur emplacement géographique. Le travail des nomades est regroupé par plusieurs familles pour optimiser la production. L’intégralité de la production des nomades est ensuite collectivisée pour une redistribution.
Ce mode de production a un double effet. Il réduit les inégalités entre les nomades, mais amène une partie d’entre eux à réduire leur motivation au travail. La population de bétail de la mongolie diminuera de moitié pendant cette période.
À côté de cet élevage par les nomades, l’industrie est lancée, et une partie de la population s’urbanise. Des usines sont créés. L’exploitation minière est aussi lancée. L’objectif : envoyer les minerais vers la Russie.
Au début de la 2eme guerre mondiale, le Japon tente d’envahir la Mongolie. L’armée rouge permets à l’armée populaire mongole de repousser les japonais. Plus tard, les mongoles enverrons des cheptels de chevaux, des chars et des armes pour soutenir les russes face aux nazis.
Bref, ces quelques évènements expliquent que les mongoles aiment globalement les russes, et pas trop les chinois-es.
Après, il y a comme un peu partout les pénuries, le rationement et la triche pour pouvoir se construire sa yourte sans attendre 5 ans. En 1991, avec la chute du bloc soviétique, la situation s’empire. Les magasins d’État ne sont plus alimentés, car le régime a changé, mais le “marché” ne l’a pas encore remplacé.
Et puis après…
Lors du changement de régime, la “privatisation” des usines a été faite de manière très intéressante. Chaque mongole a reçu une part en action des usines anciennement étatiques. Beacoup de nomades ne savaient malheureusement pas de quoi il s’agissait, et on échangé à des capitalistes leurs actions contre un mouton. Les petit-es malin-es qui ont réalisé ce troc massif à l’époque sont devenus la haute bourgeoisie mongole aujourd’hui.
Maintenant, la société de consommation est arrivée avec la démocratie. Les nomades ont regagné en motivation dans l’élevage, et la population de bétail a réaugmenté considérablement.
Le parti révolutionnaire est par contre toujours au pouvoir, en coallition avec le parti démocratique. C’est là que ça devient drôle.
Il y a très souvent des grèves en mongolie. Cette année, le “palais du gouvernement” a été ornée d’une barrière qui créé un petit parc et un vide sanitaire autour de ses murs sur une 50 aine de mètres. La raison, les grévistes de l’an dernier ont attaqué le palais en lançant y des tomates.
À côté de ça, des manifestations ont dégénéré. Le bureau du parti révolutionnaire ainsi que des voitures à proximité ont été incendiés par les manifestant-es. Le lendemain, l’armée et les chars étaient envoyés contre les manifestant-es, causant 4 morts (dont 1 flic). Il faut croire que les chars et les balles contre les manifestant-es, ça n’est pas l’exclusivité des régimes communistes. Ciel, on m’aurait menti ?!
Voilà ma compréhension de l’histoire mongole, pour la version qui va bien, il y a toujours wikipedia.

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5 réponses à Ce que j'ai compris de l'histoire mongole

  1. marie dit :

    voilà de quoi continuer ta doc ! http://www.cairn.info/revue-etudes-2003-5-page-597.htm
    mais voici le passage que je préfère: “La sédentarisation forcée des tribus nomades, appliquée systématiquement, à partir de 1928, dans les républiques d’Asie centrale soviétique[4] ” puis: “Mais, en conséquences humaines, le prix à payer fut lourd, avec l’éradication du bouddhisme, la déportation des intellectuels et la destruction massive des principaux temples du pays.
    finalement la nostalgie de communisme c est qu à l époque y avait du boulot pour tt le monde, en même tps à 4 sur un balais pour une pièce de 15m sur 10… ben pas étonnant que ça n est pas tenu^^ mais franchement pas certaine que la vie soit plus joisse pour tt le monde aujourd’hui. tient tu peux t intéresser aux gamins (“Les enfants sont battus, violés, s’échappent. Si bien qu’un grand nombre de marmots se retrouvent à la rue, orphelins véritables ou par choix. Ils survivent comme ils le peuvent, d’où le pickpockétisme constant. L’hiver, ils dorment dans les égouts pour échapper au froid glacial” issu de http://ne-mattendez-pas-pour-diner.fr)
    voilà un peu de lecture et un peu de boulot pour toi, faudrait pas que ce blog ne serve qu à nous rappeler qu on est à la maison pendant que tu t amuses à rejouer la charge héroïque de gengis khan à pétaouchnoquelesoies nomdidjiou!!! (pierre khan… à creuser) bisous.

  2. Marjo dit :

    Oulan-Bator,
    ca a l’air trés épuré comme ville… Mais y a t il un quartier ROUGE??? lol..
    Bonne continuation!!
    Marjo

  3. alex dit :

    bon tu fais ch… Pierre on n a pas de news, alors vs etes coince ou avec ces chevaux avec Eric! Bisous de Chengdu ou ns essayons de constituer un groupe pour le Tibet!

  4. René dit :

    Salut Pierre!
    C’est toujours intéressant de suivre ton expérience depuis ton départ de Berlin. Les contacts avec les gens du peuple sont le contraire du tourisme de consommation qui fait passer à côté de l’essentiel de la vie des gens. Mais penses-tu pour autant qu’ils vont te parler à cœur ouvert au bout de quelques heures ou quelques jours?
    Ainsi, quand tu écris: “Avec le passage à la démocratie capitaliste, il faut croire que les russes n’ont pas foncièrement gagné en liberté, ils/elles ont surtout perdu en avantages sociaux et ont découvert le chômage. À côté de ça, la période glorieuse pour la Russie s’est arrêté avec la chute du régime communiste, ça a forcément des effets de bord (là aussi, merci de m’incendier), je rapproche cette autre affirmation de Wikipédia: “Anna Politkovskaïa est la 21e journaliste assassinée en Russie depuis l’élection de Vladimir Poutine en 2000[” Même s’ils n’ont pas tous été exécutés pour leur oppositiobn au régime, j’en déduis qu’avec Vladimir, il faut faire très attention à ce qu’on dit!
    Concernant le Mongols, la tentative de redistribution est intéressante, mais, faute de formation et d’information,en l’absence de règles bien définies pour limiter l’accaparement des biens de productions pa

  5. René dit :

    Salut Pierre!
    C’est toujours intéressant de te lire depuis ton départ de Berlin. Les contacts avec les gens du peuple sont le contraire du tourisme de consommation qui fait passer à côté de l’essentiel de la vie des gens. Mais penses-tu pour autant qu’ils vont te parler à cœur ouvert au bout de quelques heures ou quelques jours?
    Quand tu écris: “Avec le passage à la démocratie capitaliste, il faut croire que les russes n’ont pas foncièrement gagné en liberté, ils/elles ont surtout perdu en avantages sociaux et ont découvert le chômage. À côté de ça, la période glorieuse pour la Russie s’est arrêté avec la chute du régime communiste, ça a forcément des effets de bord (là aussi, merci de m’incendier)”, je rapproche cette autre affirmation de Wikipédia: “Anna Politkovskaïa est la 21e journaliste assassinée en Russie depuis l’élection de Vladimir Poutine en 2000”. Même s’ils n’ont pas tous été exécutés pour leur opposition au régime,avec Vladimir, il faut faire très attention à ce qu’on dit! La Russie n’est encore pas passée à la démocratie.
    Concernant les Mongols, l’expérience de redistribution est intéressante, mais, faute de formation et d’information,en l’absence de règles bien définies pour limiter l’accaparement des biens de productions par les plus malins, on se retrouve soit dans le cas de figure des apparatchiks, soit dans celui des capitalisme sauvages, qui reconcentrent rapidement les moyens de production à leur profit.
    A bientôt pour la suite de ton voyage.
    Amitiés.

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